"Heureux celui qui dort sans négligence, dont l’esprit reste pur au coucher comme au réveil."- Bouddha
Le Bouddha n’a jamais ignoré l’importance du sommeil. Sans excès ni négligence, il enseigne un juste repos, essentiel à une vie éveillée.
Dans les enseignements du Bouddha, le sommeil n’est ni condamné ni encouragé sans discernement. Il est vu comme un besoin naturel du corps, mais aussi comme un domaine dans lequel peut s’exercer la vigilance. Le Bouddha invite à cultiver une attention lucide jusque dans les moments de repos, car c’est dans les transitions – comme l’endormissement – que l’esprit révèle souvent ses habitudes profondes.
Le Bouddha ne valorise jamais le manque de sommeil pour lui-même. Dans le Vinaya Pitaka, il interdit même à certains moines de continuer des pratiques ascétiques extrêmes liées au sommeil, comme rester debout toute la nuit. Il reconnaît que le manque de repos affaiblit la concentration (samādhi) et l’énergie juste (viriya), deux qualités indispensables sur le chemin de l’Éveil.
Mais à l’inverse, un sommeil excessif est considéré comme un obstacle. La somnolence mentale – appelée thīna-middha – fait partie des cinq empêchements majeurs de l’esprit. Ce n’est pas tant le sommeil physique qui pose problème, mais l’état d’inertie mentale qu’il peut entraîner lorsqu’on s’y abandonne sans vigilance.
Dans le Anguttara Nikāya, le Bouddha parle de "la paresse du matin, du midi et du soir" comme des formes de torpeur qui naissent du manque de motivation spirituelle. Il invite les disciples à reconnaître ces tendances, non pour les réprimer, mais pour en comprendre l’origine: souvent, une fatigue de l’âme plus que du corps.
Il existe aussi une dimension karmique subtile au sommeil. Un sommeil rempli de colère, de convoitise ou d’agitation renforce ces états mentaux. À l’inverse, s’endormir dans un état paisible, avec bienveillance (mettā) et clarté, contribue à purifier l’esprit. C’est pourquoi certains textes recommandent de cultiver mettā avant de s’endormir – non comme une simple pratique morale, mais comme une hygiène mentale nocturne.
Enfin, le Bouddha enseignait aux moines de s’endormir en posture du lion, sur le côté droit, avec attention portée à la respiration ou à la présence mentale. Cette manière de dormir permet de faire du sommeil lui-même un terrain de pratique. Il ne s’agit pas de dormir moins, mais de dormir mieux: sans attachement, sans paresse, sans confusion.
Dans la vision bouddhiste, même le sommeil devient une opportunité d’Éveil, pour peu qu’on y entre avec lucidité.
Le sommeil, selon le Bouddha, n’est ni à rejeter ni à glorifier. Il fait partie des besoins naturels du corps, à condition de ne pas y céder par paresse ou attachement. Le sommeil devient vertueux lorsqu’il soutient la clarté de l’esprit et l’effort juste. Le pratiquant bouddhiste cherche à établir une relation équilibrée et consciente avec le sommeil, en cultivant la vigilance même dans les moments de repos.
Le Bouddha recommandait souvent la "posture du lion" pour dormir: allongé sur le côté droit, la main droite sous la tête, les jambes légèrement repliés. Cette position est non seulement un symbole de dignité mais elle est aussi considérée comme favorisant un sommeil calme et éveillé. Elle est encore pratiquée par de nombreux moines aujourd’hui.